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Habemus papam ! Born in the U.S.A.

Le 8 mai 2025, au moment où, sur la place de l’Etoile, les 80 ans de la victoire alliée lors de la Seconde Guerre Mondiale étaient commémorés, une fumée blanche s’échappe de la cheminée de la chapelle Sixtine. Une première pour de nombreux lecteurs de Graffiti. En effet, l'élection du 267e pape de l’histoire de l'histoire venait de s’achever : Habemus papam ! Le nouveau pontife n’est pas anodin : premier dirigeant nord- américain, il prend le nom de Léon XIV, faisant vibrer la place Saint-Pierre lors de son apparition au balcon. Mais qui est ce nouveau chef de l’Eglise catholique, qui ne faisait pas partie des favoris ?



L’origine du nom


Le choix du nom « Léon XIV » n’est pas anodin. Il s’inscrit dans une histoire lourde de sens, renvoyant à deux figures majeures de l’histoire de la papauté.


Il serait logique de penser que cette décision fut prise dans la continuité de Léon XIII (1878-1903), pape réformateur et père de la doctrine sociale de l’Église. Léon XIII a su faire entrer la papauté dans la modernité, en s’ouvrant aux questions sociales et en dénonçant l’exploitation des plus pauvres, notamment dans son encyclique Rerum Novarum. En choisissant ce nom, Léon XIV affiche son désir de continuer cet héritage social et de dialogue, éventuellement dans une optique de réunification de l’Eglise.


Cependant, il est possible de remonter la lignée jusqu’à Léon Ier, dit « le Grand », qui fut pape de 440 à 461, célèbre pour avoir convaincu Attila le Hun de renoncer à l’invasion de Rome et de au contraire faire demi-tour. Ce rôle de défenseur rappelle la patronne de Paris, sainte Geneviève, dont la statue sur le pont de la Tournelle (créée par Paul Landowzki en 1928) est orientée vers l’Est, en référence à la protection qu’elle apporte depuis qu’elle aurait empêché Attila, sur mole le fléau de Dieu, d’envahir Paris. L’église sainte Geneviève est aussi l’ancien nom du Panthéon de Paris : Louis XV, malade, l’aurait priée de le guérir, et si elle accomplissait ce miracle, il bâtirait une église en son honneur. À travers ce nom, Léon XIV s’inscrit dans une lignée de défenseurs de la paix, comme il le rappelle lors de sa première phrase en tant que pontife “La paix soit avec vous tous !”.



Un fils de saint Augustin


Léon XIV est le premier pape issu de l’Ordre de Saint-Augustin depuis des siècles. Cet ordre, fondé au XIIIe siècle mais inspiré par la règle de saint Augustin d’Hippone, prône la vie commune, la recherche de la vérité et le partage, mettant l’accent sur l’unité dans la charité, l’intériorité, et la mise en commun des biens matériels et spirituels. C’est un modèle anti-individualiste, où chacun reçoit selon ses besoins et donne selon ses moyens.


Dès son premier discours, Léon XIV s’est revendiqué « fils de saint Augustin, un augustinien », affichant son attachement à cette tradition de dialogue, d’ouverture et de recherche de la paix. L’ordre, bien que moins présent aujourd’hui, reste présent dans une cinquantaine de pays, particulièrement en Amérique du Sud, où le pape a longuement exercé son ministère. Cette appartenance donne à son pontificat une tonalité particulière : celle de l’écoute, mais aussi de la détermination à servir les plus pauvres et à promouvoir l’unité.


Un parcours international


Né à Chicago en 1955, Robert Francis Prevost grandit dans une famille d’ascendance française, italienne et espagnole. Après des études mathématiques, il entre chez les Augustins et prononce ses vœux solennels en 1981. Ordonné prêtre à Rome en 1982, il poursuit des études de droit canonique avant de partir en mission au Pérou. Il y dirige des séminaires, enseigne, fonde une paroisse dans la périphérie pauvre et devient une figure marquante de l’Église locale. Il sera ensuite évêque de Chiclayo, puis appelé à Rome pour diriger l’Ordre de Saint-Augustin et, plus récemment, le Dicastère pour les évêques, un poste stratégique dans la gouvernance de l’Église.


Ce parcours, marqué par l’international, la proximité avec les plus démunis et la gestion de responsabilités complexes, lui confère une stature universelle. Il noue des liens étroits avec trois continents (L’Europe et les deux Amériques), lui donnant ainsi une portée mondiale.


Les prémices du pontificats


Dès ses premiers jours, Léon XIV a donné le ton : simplicité, proximité, et attention. Sa première sortie au Vatican, ponctuée de poignées de main, de bénédictions et même de selfies avec des fidèles, a marqué par son accessibilité. Lors de la messe inaugurale, il a dénoncé une économie « qui exploite les ressources de la Terre et marginalise les plus pauvres », appelant à « construire un monde nouveau où règne la paix ». Il a insisté sur l’unité de l’Église et la charité, préférant l’accueil à la domination, dans la lignée de la tradition sociale inaugurée par Léon XIII et poursuivie par François.




Léon XIV s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur François, dont il fut un proche collaborateur, mais il entend imprimer sa marque. Ouvert au dialogue, il est perçu comme capable de rassembler une Église traversée par de fortes tensions internes. Sa rapidité d’élection témoigne d’un large consensus parmi les cardinaux.


Défis et perspectives


Les défis qui attendent Léon XIV sont considérables. Il devra entre autres poursuivre la lutte contre les abus sexuels dans l’Église, maintenir le dialogue avec les différentes orientations internes, des plus conservatrices aux plus progressistes. Sur la scène internationale, il sera attendu sur la défense de la paix, la justice sociale et la question écologique, alors que le monde connaît des conflits majeurs et une montée des populismes. Le pontife doit continuer l’ouverture de l'Église et faire face aux défis de son époque.


En somme, Léon XIV s’avance comme un pape de la continuité et de la nouveauté. Il devra retrouver un ordre et une cohésion par le dialogue, doctrine sociale qu’il a toujours revendiquée.

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