Face à la pandémie et au chaos causé par l’émergence de nouveaux virus d’origine animale, des scientifiques proposent une solution inédite : ils veulent vacciner la faune sauvage ! L'intérêt serait de « prévenir plutôt que de guérir ». En détruisant les souches naturelles de virus tels que Ebola et Nipah, on éviterait de revivre l’enfer de l’année 2020, en pire. Un projet plus qu'intéressant, quand on sait que 75 % des maladies infectieuses émergentes proviennent du monde animal et font plus de 2 millions de morts par an, hors COVID-19...
Les vaccins contagieux sont des vaccins qui se diffusent et se propagent par — ou comme — des virus (ils sont alors appelés virus-vaccins). Pour cela, on prend un virus inoffensif (oui, il y en a !) et on lui greffe une portion du génome du virus à neutraliser. Explication : on insère dans l’ARN d’un virus bénin des gènes d’un virus dangereux. Ainsi, quand un animal est infecté par le virus-vaccin, il devient immunisé contre le virus nocif. De cette manière, l’animal est vacciné. Ensuite, le virus porteur (inoffensif) se pro- page de façon naturelle, infectant les êtres d’une espèce selon son modèle épidémiologique, les vaccinant au fur et à mesure. On assiste alors à une vraie épidémie de vaccins !
Les animaux concernés sont des réservoirs à virus (tels que Lassa, Ebola, Nipah...) connus dans le monde médical : rats, singes, chauve-souris... etc. En vaccinant certaines espèces contre ces virus, on parviendrait à empêcher une pandémie, avant même que ceux-ci n’infectent l’Homme. Ce système n’est pas sans difficulté, car il faut trouver un virus propre à une espèce (pour éviter tout désastre dans la biodiversité), qui ne mute pas beaucoup (pour empêcher les complications hasardeuses) et qui puisse se transmettre facilement et rapidement dans la nature (sans y persister trop longtemps non plus, pour ne pas devenir incontrôlable). Malgré certaines pistes encourageantes, on n'a pas encore découvert de solutions à ces contraintes.
Par conséquent, ce vaccin idyllique n’est pas tout à fait opérationnel. Les scientifiques en sont toujours au modèle théorique, ou plutôt numérique : les outils préférés des chercheurs sont les simulations numériques, qui demeurent les meilleurs moyens de prédire l’avenir (scientifiquement parlant). Certes, on a déjà observé plusieurs contaminations de vaccins en laboratoire, où, au sein d’une même espèce, des animaux se transmettent une immunité par contagion. Malheureusement, il reste une grande étape entre ces expériences en milieu clos, avec une seule espèce représentée et un seul virus, et l’incroyable complexité de la faune sauvage.
De plus, les chercheurs envisagent un nombre colossal de scénarios catastrophes : le virus injecté pourrait retrouver sa virulence ; une mutation engendrerait un nouveau virus, aux effets incertains et dangereux ; le virus pourrait infecter d’autres espèces que celle visée, causant des dégâts irréversibles... bref, ce projet tient plus de la science-fiction que de la réalité. Bon, en prévision de prochaines pandémies, comptez sur votre Sécu !
Arthur Cornelis